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Régis Brunel

Les peurs chez l'enfant

Pour le dictionnaire, la peur est un sentiment d'angoisse éprouvé en présence ou à la pensée d'un danger, réel ou supposé, d'une menace. Elle est un instinct de conservation provoqué par l'analyse du danger et elle permet au sujet de le fuir ou le combattre. Son rôle est de nous protéger en plaçant notre corps en alerte. La peur est une émotion normale de l'organisme au même titre que peuvent l'être la joie ou la tristesse.

Tous les enfants ont des peurs à différents moments de leur vie : c’est normal. Cela fait partie de leur développement. Chez les enfants, les peurs se présentent généralement devant l’inconnu.

Ainsi, vivre des expériences nouvelles, rencontrer des inconnus ou entendre des bruits étranges peut représenter une menace pour un enfant parce qu’il ne sait pas comment affronter ces situations. Par exemple, un enfant peut avoir peur d’aller chez le dentiste la première fois parce qu’il ne sait pas comment ça va se passer.

L’imagination des enfants peut aussi entraîner des peurs. En effet, avant 5 ou 6 ans, il est difficile pour un tout-petit de faire la différence entre son imaginaire et le monde réel. Il peut alors imaginer qu’il est possible de rencontrer des personnages fantastiques comme des sorcières, des monstres ou des dragons.


Quelques peurs fréquentes selon l’âge de l’enfant :


8 mois : Peur des étrangers et d’être séparé de son parent. Cette peur appelée l’angoisse de séparation ou angoisse du 8e mois peut se prolonger quelques mois.

1 an : Peur des bruits (aspirateur, tondeuse, mélangeur, etc.).

2 à 4 ans : Peur du noir et des créatures imaginaires (ex. : monstres, sorcières, fantômes) et de personnages comme les clowns et le père Noël. C’est à cet âge qu’apparaît aussi la peur des orages, des insectes et des animaux comme les chiens et les loups.

5 à 12 ans : Peurs associées à une situation particulière (voleurs et kidnappeurs, médecins et dentistes, peur du vide, de la mort, des accidents, des incendies). L’enfant peut aussi avoir peur des catastrophes naturelles (ex. : tremblement de terre, tempête) ou de la guerre, après avoir vu des images à la télévision. C’est aussi l’âge des peurs sociales (peur d’être rejeté par les autres, de parler devant la classe, etc.).


Quelques conseils généraux pour aider un enfant qui a peur :


Les peurs enfantines sont passagères. À mesure que l’enfant grandit et vit des expériences, il apprend à distinguer les situations dangereuses de celles qui ne le sont pas. Grâce à l’aide de ses parents, il peut arriver à surmonter ses peurs.

Prenez au sérieux la peur de votre enfant. Il ne faut pas le ridiculiser ni le disputer. La peur qu’il ressent est bien réelle même si elle vous semble non fondée et sans importance. En revanche, ne réagissez pas trop et évitez de surprotéger votre enfant, car cela renforcerait sa peur.

Réconfortez-le calmement s’il est bouleversé en le tenant dans vos bras et rassurez-le en lui disant que tout ira bien. Il est important de rester calme même si votre enfant s’affole. Autrement, vous lui donnez l’impression qu’il a vraiment raison de s’inquiéter.

Aidez-le à mettre des mots sur ses émotions pour qu’il apprenne à nommer ses peurs et parlez-en avec lui. Dites-lui que vous le comprenez et essayez de lui montrer qu’il n’y a pas de danger, qu’il est en sécurité.

Essayez de décoder ses signaux pour l’aider à parler de ce qu’il ressent. Votre enfant peut montrer qu’il a peur en se cachant, en fermant ses yeux ou en tremblant.

Choisissez bien vos mots. Si vous dites : « N’aie pas peur, ça ne fera pas mal ! » en allant chez le dentiste, vous envoyez un message de danger. Dites plutôt : « Tu verras, les dentistes ont l’habitude avec les enfants. Ça va bien se passer. »

Renforcez le courage de votre enfant. Rappelez-lui les situations où il n’a pas peur. Parlez-lui aussi des moments où il a réussi à vaincre sa peur et rappelez-lui comment il a réussi à le faire. Parlez-lui de vos propres peurs quand vous étiez enfant et de vos trucs pour les éloigner ou pour vous rassurer. Votre enfant réalisera qu’il n’est pas le seul à avoir des peurs et qu’il y a plusieurs moyens de les surmonter.

Attention à vos réactions quand vous avez peur. Si vous criez à la vue d’une araignée ou au bruit du tonnerre, vous risquez de transmettre votre peur à votre enfant. Si cela vous arrive malgré tout, dédramatisez la situation en riant de l’effet de surprise que vous avez eu.

Utilisez les jeux, les dessins et les histoires. Ça fait du bien de dessiner un cauchemar ou de le raconter à quelqu’un de bienveillant. Le jeu du coucou est un bon moyen d’aider un bébé à apprivoiser son angoisse de séparation. Dessiner peut aussi aider votre enfant à exprimer ses peurs. Enfin, si votre enfant a peur des chiens ou des fantômes, vous pouvez lui raconter des histoires sur un gentil chien ou un gentil fantôme !

Ne forcez pas votre enfant à affronter ses peurs. Respectez son rythme. Lorsque vous sentez que votre enfant est capable d’affronter ses craintes, encouragez-le avec douceur en le mettant petit à petit en contact avec ce qui le terrifie. Peu à peu, sa peur diminuera et son sentiment de sécurité augmentera.

Soulignez ses réussites. Même les plus petites réussites encourageront votre enfant à essayer de nouveau.


Faut-il éviter de raconter des histoires qui font peur aux enfants ?


Non. Les histoires mettant en scène des personnages qui peuvent faire peur permettent aux enfants de nommer les émotions qu’ils ressentent face à ces personnages. Comme les contes présentent souvent des héros qui triomphent sur les méchants, votre enfant peut s’identifier aux personnages et surmonter ainsi sa peur. Choisissez des livres remplis d’humour. Cela permet à votre enfant de dédramatiser ses craintes. Ne vous inquiétez pas s’il redemande la même histoire chaque soir. Cela peut être le signe qu’il est en train d’apprivoiser sa peur !


Un exemple de peur : La peur du noir et des monstres.


Le soir, avec le noir, tout devient différent : même une ombre peut devenir effrayante. Pour se rassurer, on peut allumer et éteindre plusieurs fois la lumière, comme ça on voit bien que les choses sont les mêmes dans le noir et dans la lumière. On peut aussi mettre une petite veilleuse. Dans la journée, on peut apprivoiser le noir en jouant à colin-maillard.

Les peurs au coucher sont fréquentes. Dans le noir, votre enfant imagine voir toute sorte de choses. Vous pouvez diminuer cette peur en rassurant votre enfant et en parlant de sa peur avec lui le jour ou avant le dodo. Rassurez-le en lui disant que les monstres n’existent pas, sauf dans les livres et à la télévision. Avant le coucher, vous pouvez vérifier une fois sous le lit, avec lui, s’il n’y a pas de jouet à ranger par exemple. Si vous vérifiez qu’il n’y a pas de monstre, vous lui donnez raison d’avoir peur : En effet, si vous avez la certitude que les monstres n’existent pas, pourquoi vérifiez-vous ? Vous pouvez aussi lui dire que vous viendrez le voir quand il sera endormi pour veiller à ce que tout se passe bien. Établissez une routine calme avant le coucher pour sécuriser votre enfant : un bain suivi d’une histoire ou de jeux tranquilles, par exemple.

Installez une petite veilleuse pour rassurer votre enfant. Il n’est pas nécessaire de l’allumer systématiquement. Mieux vaut lui laisser le choix de l’utiliser ou non. Vous pouvez aussi laisser une lampe de poche dans sa chambre.

Si votre enfant se réveille effrayé la nuit, allez le réconforter rapidement et écoutez-le sans l’interrompre, puis aidez-le à différencier la réalité de son imagination. L’amener aux toilettes ou lui faire boire de l’eau peut par exemple l’aider à penser à autre chose ou le rassurer parce qu’il voit que tout va bien dans la maison. Si votre enfant semble toujours très inquiet, vous pouvez vous allonger avec lui dans son lit le temps qu’il se calme. Évitez cependant de prendre l’habitude de dormir avec lui chaque fois qu’il a peur, car cela pourrait amplifier sa peur. D’abord on reste ensemble dans le noir en parlant, ensuite on reste en silence et enfin, quand l’enfant se sent prêt, la grande personne s’en va (enfant non encore endormi).

Ça rassure aussi d’entendre les petits bruits de la maison : les voix des parents, le bruit du frigo, le tic-tac du réveil… Autant de repères familiers rassurants.

Tout le monde a le droit d’avoir peur : les grandes personnes aussi, même si elles ne le disent pas toujours.

Bien souvent, on a peur car on ne comprend pas ou on manque d’explication. Si on n’a pas d’explication on imagine, et c’est souvent pire que la réalité. La parole vient réparer ça.



Le mot de la fin à Catherine Dolto : Si on n’avait pas peur, on ne grandirait pas. La peur nous freine ou bien elle nous pousse à faire des choses nouvelles. Chaque fois qu’on grandit un peu, on laisse des peurs de quand on était petit derrière nous. Les peurs nous aident à devenir grands.


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